Publié le 6 novembre 2020
Près de 75 % de la population européenne vit dans les zones urbaines et une grande partie de cette population est exposée de manière chronique à des épisodes où les concentrations de l’air en polluants atmosphériques dépassent les normes fixées.
La pollution de l’air en milieu urbain accroît le risque de maladies respiratoires aiguës et chroniques, ainsi que de maladies cardio-vasculaires. D’après l’OMS, la pollution de l’air est responsable de la mort de 7 millions de personnes chaque année dans le monde.
Réduire la pollution urbaine, et notamment les concentrations en particules fines, permettrait donc de sauver des vies et de minimiser tant les coûts sanitaires qu’économiques. Mais la mise en œuvre de politiques d’améliorations de la qualité de l’air et la prise de décisions adéquates en matière de gestion urbaine ne peuvent se faire qu’après analyse de la situation au niveau local.
Pour effectuer des évaluations de risques fiables, il est indispensable d’avoir un aperçu détaillé de la répartition spatiale et temporelle de la pollution atmosphérique dans la ville.
Lorsque l’arbre devient station de mesure
Bien que les stations conventionnelles de contrôle de la qualité de l’air ne cessent de se perfectionner et de se multiplier, elles ne fournissent que des informations grossières et ponctuelles sur l'exposition réelle de la population aux polluants atmosphériques.
De nouvelles techniques alternatives innovantes sont donc en plein développement dans ce domaine de la surveillance et de la modélisation de la pollution atmosphérique urbaine à haute résolution spatiale. C’est le cas par exemple de la biosurveillance grâce à la végétation urbaine, couplée à des techniques de télédétection.
Et la feuille, l’émetteur
Les arbres en ville sont souvent soumis à des situations de stress dues au manque d'espace pour leurs racines, à une pénurie d'eau et de nutriments, à un ensoleillement trop faible ou à l’exposition à la pollution atmosphérique.
En réponse à ce stress environnemental, l’arbre tente de résister et ses feuilles peuvent adapter leur physiologie et même leur morphologie afin de continuer à fonctionner de manière optimale. Ces changements foliaires induits par le stress peuvent être détectés à l'aide de techniques de télédétection, plus précisément en mesurant la réflectance hyperspectrale des feuilles et la fluorescence de la chlorophylle foliaire.
Exemple de produit de fluorescence (SIF: solar-induced chlorophyll fluorescence) obtenu par HyPlant, un spectromètre imageur aéroporté de haute performance pour la surveillance de la végétation. Cette image a été acquise au sud de Julich, en Allemagne, le 26 juin 2018, à une altitude de 1800m. La longueur d'onde étudiée est 751 nm et la résolution des pixels est de 2,65 m.
Cette fluorescence, un léger rayonnement de longueurs d'onde comprises entre le rouge et le proche infrarouge, est généralement négligée car elle est submergée par la réflexion de la lumière du soleil sur les végétaux. Les techniques de détection de ce faible signal ont été affinées et la fluorescence peut maintenant être mesurée par des capteurs spécifiques, permettant de détecter le stress chez les végétaux.
HYPERCITY, un projet pour mieux respirer
Le projet STEREO HYPERCITY (HYPERspectral biomonitoring: air quality and the CITY) explore le potentiel de la reflectance hyperspectrale et de la fluorescence chlorophyllienne comme indicateurs de la qualité de l’air, tant au niveau des feuilles qu’à celui de la canopée.
Deux zones d'étude ont été sélectionnées afin de couvrir différentes classes d'utilisation des sols : Anvers, située dans un climat maritime doux et Valence (Espagne) située dans un régime climatique méditerranéen.
Campagne de mesure à Valence
L'objectif du projet est donc de développer, tester et valider une méthodologie de biosurveillance passive des végétaux basée sur des observations hyperspectrales.
L'exposition à la pollution atmosphérique peut altérer la physiologie et l'anatomie des feuilles d'une manière qui modifie également l'asymétrie dorsiventrale des feuilles (càd l’hétérogénéité de structure entre la face supérieure et inférieure de la feuille) et la fluorescence de la chlorophylle. Dans le projet HYPERCITY, cette asymétrie est également prise en compte comme un indicateur prometteur de la pollution.
Les indices spectraux sont le résultat d’opérations mathématiques appliquées aux valeurs numériques enregistrées dans différentes bandes spectrales. L’équipe du projet, qui réunit des chercheurs des université d’Anvers, de Hasselt et de Valence, a pu développer des indices qui permettent de distinguer la végétation en fonction du niveau de pollution de l’endroit où elle pousse.
Chaque arbre devient ainsi potentiellement une station de surveillance et la végétation urbaine un outil de cartographie de la qualité de l'air.
Plus d'infos
Projet STEREO HYPERCITY (Hyperspectral biomonitoring: air quality and the city)