Publié le 15 mars 2021
Un tapis roulant qui joue un rôle de thermostat
Induit par des facteurs atmosphériques et par des différences de température et de salinité des eaux, l'AMOC (Atlantic meridional overturning circulation) distribue vers les hautes latitudes les eaux chaudes des basses latitudes. Ce système permet donc de rééquilibrer les différences de température entre les zones tropicales et les pôles. Au total, ce sont ainsi près de 20 millions de mètres cubes d’eau par seconde qui sont déplacés, soit près d’une centaine de fois le flux du fleuve Amazone.
Professeur Stefan Rahmstorf, coauteur de l’étude.
La circulation océanique constitue donc une composante fondamentale du système climatique de la Terre et la crainte d’un ralentissement de l'AMOC et du Gulf Stream, l'une de ses composantes, en conséquence du réchauffement global, est un sujet de préoccupation pour les scientifiques depuis plusieurs décennies.
Un affaiblissement des courants océaniques dans l’Atlantique peut en effet avoir des conséquences très importantes à l'échelle du globe. Parmi celles-ci, une baisse importante des précipitations dans la région du Sahel, une augmentation de la fréquence des tempêtes et une augmentation du niveau des mers en Amérique du Nord et en Europe, une baisse importante de la production biologique marine et des saisons plus contrastées en Europe (avec des hivers plus rigoureux et des étés très chauds).
Schéma simplifié de la circulation océanique globale. Source: Plateforme Océan & Climat
Un affaiblissement sans précédent
Une étude récemment publiée dans la revue scientifique Nature Geoscience montre que la circulation thermohaline atlantique, très stable depuis environ un millénaire, a vu son activité diminuer de manière importante au cours du dernier siècle en raison du réchauffement global.
La différence de densité entre les eaux de surface et les eaux profondes est le moteur de la circulation thermohaline. Les eaux de surface qui, au terme de leur parcours du Sud au Nord ont subi une forte évaporation, ont une concentration en sel plus élevée et sont donc plus denses que les eaux froides non salées venant des pôles. Elles plongent donc vers les profondeurs de l'océan et créent un courant profond qui se dirige vers le Sud.
En raison du réchauffement, ces eaux de surface sont moins denses du fait de leur dilatation thermique. De plus, la fonte des glaciers et des banquises et la modification du régime des précipitations aux hautes latitudes injectent de grandes quantités d’eau douce dans les eaux de surface des océans. Cette addition d’eau douce rend également l’eau moins salée, et donc moins dense.
Professeur Stefan Rahmstorf.
Température de surface de la mer
La température de surface de la mer est une variable physique fondamentale utilisée pour comprendre, quantifier et prévoir les interactions complexes entre l'océan et l'atmosphère. En conjonction avec d'autres paramètres océaniques, elle est utilisée pour cartographier les tendances historiques de l'AMOC et du Gulf Stream.
Température de surface de l'océan Atlantique Nord prévue par le service de surveillance du milieu marin Copernicus, le 8 mars 2021
L'image ci-dessus représente la température de surface de l'océan Atlantique Nord prévue par le service de surveillance de l'environnement marin de Copernicus (CMEMS), le 8 mars 2021. Ce service fournit des produits et services océanographiques pour la sécurité maritime, la surveillance de l'environnement côtier et marin, les prévisions climatiques et météorologiques et l'utilisation des ressources marines. Ce sont ainsi plus de 150 produits qui sont obtenus en combinant des observations océaniques in situ, des images satellitaires fournies par les missions Copernicus et des modèles de prévision océanique mis à jour quotidiennement.
Au sein du programme STEREO, comme dans l'ensemble de la communauté scientifique, l'évolution des températures de surface de la mer est depuis longtemps étudiée. Il y a 16 ans déjà, nous abordions le sujet en commentant une image acquise par le capteur MODIS à bord du satellite Aqua de la NASA.
Et il y a 10 ans, des scientifiques financés par le programme STEREO dans le cadre du projet HISEA travaillaient déjà à développer des méthodes permettant d'obtenir des estimations de températures de surface de la mer avec une meilleure résolution tant spatiale que temporelle.
Consciente de l'importance d'améliorer encore à l'avenir notre compréhension de la dynamique des océans, des glaces et des terres, l'ESA a récemment choisi la mission Harmony comme l'une des futures mission Earth Explorer. Chaque satellite Harmony embarquera, outre un capteur radar permettant de mesurer de faibles modifications de la surface terrestre, un instrument fonctionnant dans l'infrarouge thermique permettant de mesurer les différences de températures à la surface de la mer.
Plus d'infos
Atlantic Meridional Overturning Circulation at weakest point in a millennium (Copernicus website)
Current Atlantic Meridional Overturning Circulation weakest in last millennium (Nature Geoscience)
ESA moves forward with Harmony
In the Atlantic Ocean, Subtle Shifts Hint at Dramatic Dangers (The New York Times)
Climat : le grand courant marin de l’Atlantique se ralentit (Reporterre)
Fiche d'information "La circulation océanique" (Plateforme Océan & Climat)