Publié le 4 juin 2021
Depuis 1974, la journée mondiale de l'environnement, célébrée le 5 juin, est la journée phare des Nations unies pour la promotion de la sensibilisation et de l'action en faveur de l'environnement.
Les forêts sont essentielles à la santé de notre environnement. Considérées comme les poumons de notre planète, elles sont aussi de hauts lieux de la biodiversité et fournissent de nombreux services écosystémiques. Comprendre où et pourquoi la couverture forestière change et comment cela affecte les écosystèmes, est donc devenu une priorité de recherche. Alors que des recherches approfondies se sont concentrées sur les modifications des forêts équatoriales humides, peu d'attention a été accordée aux zones boisées subtropicales et aux forêts ouvertes. Il a pourtant été démontré que les taux les plus élevés d'expansion agricole se sont récemment déplacés vers ces derniers biomes, notamment en Amérique du Sud. Les zones boisées subtropicales sont adaptées aux longues saisons sèches, la végétation ayant développé différentes stratégies pour faire face aux événements de sécheresse extrême. Leur importance en termes de biodiversité et de services écosystémiques ne peut être sous-estimée.
Les chiffres sont impressionnants. De 1984 à 2016, près d'un quart des forêts ont disparu dans la région du Gran Chaco et près de 10 % des forêts restantes ont été dégradées.
Les chercheurs du projet STEREO REFORCHA ont analysé les relations croisées entre la dynamique de l'utilisation des terres, la végétation et la dégradation des sols, en suivant à la fois les conversions et les changements subtils dans les forêts subtropicales. Avec des partenaires argentins, ils ont étudié la dégradation des écosystèmes dans la région de Gran Chaco en Argentine qui abrite la plus grande forêt sèche continue du monde.
Grâce à l'impressionnante archive d'images Landsat, ils ont pu caractériser les perturbations forestières liées à la dégradation des forêts dans l'ensemble du Gran Chaco argentin (environ 489 000 km2) sur une période de plus de 30 ans.
Carte du Gran Chaco indiquant l'année de détection des perturbations (De Marzo et al., 2021)
Pour mieux comprendre la dynamique de la forêt, les équipes ont aussi utilisé des drones pour surveiller plus de 60 parcelles forestières. Ils ont ainsi échantillonné des parcelles à différents stades de dégradation et ont analysé les perturbations de la végétation. L'imagerie par drone d'une résolution de l'ordre du centimètre a permis de reconstruire la végétation en 3 dimensions à l'aide de techniques de structuration à partir du mouvement (Gobbi et al., 2020).
Reconstruction de la structure forestière à l'aide des techniques UAV-SfM (Unmanned Aerial Vehicle - Structure from Motion)
La dégradation des forêts dans les zones sèches peut entraîner des changements majeurs dans l'équilibre hydrique des sols et leur salinisation. Dans toute la région du Gran Chaco, les agriculteurs ont signalé une importante salinisation de leurs terres cultivées, qui se produit plusieurs années après le défrichement de la forêt. La détection précoce et en temps utile de la dégradation des sols est nécessaire pour empêcher l'appauvrissement continu des terres. Dans le cadre du projet REFORCHA, les équipes ont relié les mesures de dégradation sur le terrain aux tendances à long terme observées à partir de données satellitaires pour révéler les risques de salinisation et identifier les zones les plus vulnérables. En intégrant les données de télédétection dans un modèle de la surface terrestre, ils ont obtenu une simulation de l'effet à grande échelle de la dynamique du couvert forestier sur l'hydrologie du sol (Maertens et al., in review).
Terres cultivées affectées par une salinisation importante du sol plusieurs années après le défrichement de la forêt. (Photographies réalisées par Michiel Maertens)
Par l'intégration de données de télédétection multi-sources, des observations de terrain et des modèles de surface, le projet REFORCHA a donc apporté une contribution importante à nos connaissances sur la dégradation des écosystèmes dans les forêts des zones arides. Ces résultats et les techniques développées constituent des outils fiables permettant à l'avenir de mieux surveiller ces écosystèmes et donc de mieux les protéger, notamment en sensibilisant les décideurs locaux aux conséquences de la déforestation.